Boys are back in town

Killian Jones, le fameux pirate plus connu sous le nom de ‘’Hook” voguait depuis de longues semaines sur les océans déchaînés. Il avait quitté les rivages du pays d’Oz avec qui équipage, et avait confié la suite de ses aventures à son fidèle sextant, souvenir douloureux de son frère chéri, Liam, alors que les deux hommes servaient sur le même bateau, sous les ordres du roi Georges. Et puis… une mission, un parchemin scellé, un monde qui n’était pas censé exister, et son destin avait changé à jamais. Liam était mort en voulant servir son pays et son roi, alors que le souverain les avait trahis. C’était pour cela que Killian avait battu pavillon noir, et écumait les mers pour satisfaire sa soif de volonté et de vengeance.

Son sextant donc, leur avait montré une direction qu’il ne connaissait pas, mais après tout, même si Killian était un marin chevronné qui avait vogué sur les sept mers, il savait très bien qu’il était loin d’avoir visité chaque recoin de ce monde. Et c’était cela qu’il aimait dans l’idée d’être un pirate. Le monde entier était son terrain de jeu, le monde marin tout du moins, et si un jour il se déciderait à abandonner les océans, il lui resterait les terres à explorer, et une vie entière ne suffirait pas. Il avait vu tant de choses, fait, et goûté tant de merveilles  au fil de ses voyages et de ses aventures. Il avait fumé l’opium dans les fumeries de Siam, vu les danses des Peaux-Rouges dans les sauvages Amériques, écouté le chant des sirènes, et senti les vapeurs soufrées des geysers perdus dans les glaciers d’Islande. Qu’il plaignait ceux qui avaient passé toute leur vie dans la même ville ou dans le même village. Tellement de choses extraordinaires qu’ils manquaient !
Ses mains couraient sur le bois verni par les ans, et lisse comme du satin, du gouvernail de son cher Jolly Rodger. Un vent frais et vivifiant, chargé d’embruns, lui fouettait le visage, et un sourire ravi éclairait son visage. Il aimait être à la barre, surtout par gros temps, car lutter contre les éléments lui donnait l’impression de combattre les dieux eux-mêmes, et de gagner, comme à chaque fois. Le navire pénétra dans une large baie, abritée des vents du large, et le bateau ralentit doucement sa marche. Bientôt une ville fut en vue. Un petit port de pêche cossu. Il mouilla le long d’un ponton, et ses hommes s’activèrent pour assurer l’amarrage du Jolly Rodger. Hook décida alors de faire un petit tour à terre, curieux de connaître la raison pour laquelle le sextant l’avait emmené dans cette bourgade d’apparence si tranquille, tellement différente des endroits exotiques et pleins de dangers qu’il avait l’habitude de fréquenter.

Ses pieds foulaient le sol du port, s’éloignant de son vaisseau bien-aimé et s’engagea dans la rue principale. Son regard errait sur les façades propres et colorées, les petites boutiques et les jardinières bien entretenues. Il flairait l’ennui à plein nez. Mais en même temps autre chose, sans savoir quoi. Un vague relent de magie, mais il n’en était pas encore certain. Certains habitants qu’il croisait le dévisageaient avec surprise et méfiance, mais il n’en avait que faire. Il profitait simplement du fait de se dégourdir les jambes sur la terre ferme, même si, en son for intérieur, il se désolait de ne pas avoir croisé ni de taverne, ni de bordel. Le temps allaient être long…

C’est alors qu’il lui sembla reconnaître quelqu’un de l’autre côté de la rue, penchée sur un stand de fleurs. Les traits de son visage, cette façon de replacer ses cheveux… Et la vérité lui sauta aux yeux avec la violence d’une gifle. Freja. La belle Freja, sa muse, son premier amour. Celle qu’il avait laissée derrière lui pour s’engager dans la marine… On était bien loin de l’Ecosse ! Ce n’était pas possible… et pourtant, plus il la regardait, plus il en était sûr. Il fallait qu’il sache, qu’il en soit sûr. Il pressa le pas et vint rejoindre la jeune femme. Attrapant une rose de sa main valide, il la tendit à la jeune femme, qui releva lentement la tête, avant de plonger ses yeux dans ceux du pirate. Le cœur de Killian s’emballa en découvrant que c’était bien elle. Freja. Il lui accora un sourire enjôleur, et demanda avec du miel dans la voix.

Freja, love ! Cette ville est bien le dernier endroit sur toute cette planète où je pensais te retrouver !

Boys are back in town

Freya… Son premier amour, celle qui avait fait battre son coeur de gosse. Elle était blonde, fragile et en même temps sauvage. Il avait été fou d’elle, et ça avait été un déchirement de la laisser, même si l’appel de la mer avait été le plus fort. Il ressentait ce besoin impérieux d’aller courir sur les mers, d’explorer des contrées lointaines, de défendre sa couronne et son roi… Et jamais il n’aurait pu faire ça en restant dans leur petit village. Il aurait voulu revenir la chercher, quelques mois plus tard, alors fier second, ou capitaine d’un vaisseau, et pouvoir lui offrir la vie qu’elle méritait. Mais les choses ne s’étaient pas passées ainsi. Il était revenu pour elle, mais elle n’était plus là. Elle avait quitté le village quelques temps après lui, sans jamais donner de nouvelles. Il l’avait cherchée, il avait voulu la retrouver… mais le monde était si vaste, et il n’avait aucun indice. Alors sa vie avait continué son cours, il s’était lancé à corps perdu dans ses voyages, et puis la mort de son frère l’avait fait devenir un pirate…

Et là, il la retrouvait dans cette petite ville si… commune. Si banale ! Il avait tenté de soigner son arrivée, attrapant une fleur qu’il lui présenta, accompagné de son plus beau sourire. Et il fut quand même surpris de recevoir pour tout accueil une gifle magistrale, assénée par la jeune femme en colère. Sa main valide effleura sa joue meurtrie.

Eh bien j’avais l’habitude d’être accueilli d’une autre manière dans le temps… Je me souviens… et je n’avais pas envie que tu essaies de me dissuader d’entrer dans la marine… Tu savais que tu ne serais pas arrivé à me changer d’avis… L’océan m’a toujours trop attiré !

C’est alors qu’il remarqua la jeune fille présente auprès d’elle. Une charmante demoiselle qui devait avoir environ quinze ans. Elle rit quand Freya le gifla, et il se tourna vers elle.

Jeune fille, c’est fort peu poli de se moquer du malheur des autres…

Son regard passa ensuite de l’une à l’autre, et il ne put s’empêcher de remarquer un air de ressemblance entre la jeune fille et Freya. Il comprit.

Je vois que tu… te portes bien. Et que tu as refait ta vie…

Boys are back in town

Le pauvre pirate était en train de passer un très désagréable moment. Si le destin l’avait remis sur la route de son premier amour, qu’il avait laissé derrière lui de si nombreuses années auparavant pour se consacrer à la marine, puis à la piraterie, les retrouvailles ne s’étaient pas déroulées de façon aussi positive qu’il l’avait cru. Bon, dans un certain sens, il est vrai qu’il avait mérité cette gifle. Il s’était souvent reproché la façon dont il avait quitté leur village pour chercher fortune et gloire sur les océans. Killian lui accorda un sourire timide, et il eut l’impression de recevoir un coup de poignard quand Freya l’accusa d’avoir déserté comme un lâche.

- Là je ne suis pas d’accord. Je suis parti sans rien dire, parce que je voulais te faire la surprise de revenir une fois que j’aurais fait mes preuves. Que j’aurais été intégré dans la marine et… que j'aurais gagné assez d’argent pour subvenir à nos besoins. Sauf que six mois après, quand je suis revenu te chercher tu… n’étais plus là. J’ai cherché partout où j’avais un espoir de te trouver mais mes recherches sont restées vaines… Je m’y suis mal pris, mais je n’ai jamais voulu t’abandonner !

Capitaine Crochet vit alors Freya se tourner vers la jeune fille et lui caresser tendrement la joue. Pendant une seconde, il admira tout l’amour qu’elle portait à sa fille, et il se dit que si les choses avaient été différentes, peut-être que lui aussi, aurait pu connaître une telle joie. Ainsi va la vie, et les vents ne sont parfois pas propices. Un peu moins assuré, et moins fier, il se pinça les lèvres, avant qu’un sourire gêné ne naisse sur son visage.

- Eh bien… je suis capitaine du Jolly Rodger et mon nom fait trembler les océans ! Freya j’ai été ravi de te revoir… De voir que tu allais bien. Je te souhaite beaucoup de bonheur pour la suite alors.

Il la salua d’un petit geste de la tête, avant de se tourner vers Sandrine.

- Et vous jeune lady, je vous conseille d’être gentille avec votre mère. Je crois que c’est la personne qui le mérite le plus sur cette terre.

Puis il tourna les talons et, sans se retourner, commença à se diriger vers le port.